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Revue généralePrise en charge de l’insomnie en médecine du travailInsomnia and occupational medicine
Introduction
De nos jours, de nombreuses situations de travail s’accompagnent de contraintes jouant sur les heures de sommeil et de repos.
Certaines enquêtes réalisées en milieu professionnel estiment que 20 à 40 % des salariés se plaignent d’un mauvais sommeil. Pourtant, ces troubles étaient jusqu’à présent peu pris en charge en médecine du travail, car bien souvent on considérait que le sommeil appartenait au domaine privé. Des liens avaient été établis depuis longtemps entre travail de nuit et troubles du sommeil, mais peu d’études étaient consacrées aux relations entre troubles du sommeil et travail de jour.
Or, l’insomnie peut concerner spécifiquement le travail, soit parce qu’elle entraîne des conséquences non négligeables sur le poste de travail lui-même (accidents ou erreurs en rapport avec une baisse de la vigilance, absentéisme), soit parce qu’elle trouve son origine dans les conditions de travail (charge physique ou mentale de travail importante, travail posté ou de nuit, décalage horaire, déplacements professionnels multiples…). De plus, les plaintes d’insomnie varient en fonction des groupes professionnels, ce qui suggère que certains aspects du travail en lui-même pourraient participer au développement et/ou à l’entretien des troubles du sommeil [1].
Il semble ainsi essentiel que le médecin du travail sache reconnaître et dépister une insomnie et la prendre en charge de façon adaptée, car l’insomnie semble être un signe de mauvaise insertion professionnelle.
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Surveillance médicale et dépistage précoce des troubles
L’insomnie est un des troubles du sommeil les plus fréquents, qui concerne entre 15 et 20 % de la population générale selon les différentes études [2].
En France, la prévalence de l’insomnie est estimée dans la population adulte à 19 % et celle de l’insomnie sévère à 9 % [3]. Compte tenu de cette prévalence élevée, il semble normal que les salariés souffrent d’insomnie et que les médecins du travail soient ainsi fréquemment confrontés aux plaintes de mauvais sommeil au cours de leur exercice
Évaluer la plainte du salarié (sévérité et répercussions de l’insomnie)
La prise en charge d’une plainte de mauvais sommeil par le médecin du travail doit être tout d’abord clinique. Elle passe par un interrogatoire précis à la recherche des troubles du sommeil et de la vigilance et par l’examen clinique du salarié.
Selon la définition du DSM IV, l’insomnie est un trouble régulier du sommeil avec difficultés d’endormissement, éveils nocturnes et difficultés à se rendormir, réveil précoce ou sensation de mauvais sommeil. Les répercussions diurnes de l’insomnie
Rechercher une origine professionnelle ou un facteur professionnel aggravant
Les conditions de travail sont souvent rapportées par les insomniaques comme étant à l’origine de leurs troubles du sommeil [3]. Parmi les insomniaques chroniques, 40 % peuvent précisément donner une cause au début de leurs troubles. Pour 20 % d’entre eux, la cause est professionnelle : licenciement, conflit, surcharge de travail. Dans la population générale, les études retrouvent un doublement de la prévalence de l’insomnie sévère dans la tranche d’âge 25–34 ans, ce qui correspond à une grande
Règles d’hygiène du sommeil et amélioration des conditions de travail
La prise en charge de tous troubles du sommeil implique le rappel des règles simples d’hygiène du sommeil [18]. La visite médicale sera ainsi l’occasion de rappeler ces règles et conseils d’hygiène indispensables à une bonne qualité de sommeil. En effet, éviter les excitants (café, thé), privilégier des activités relaxantes le soir, dormir dans une chambre aérée, éviter un repas trop copieux ainsi que la consommation d’alcool au dîner sont des conseils à rappeler au salarié lors de chaque
Conclusion
Le sommeil est un bon indicateur de la tolérance au travail. Savoir interroger le salarié sur son sommeil ainsi que rechercher les causes professionnelles pouvant déclencher ou aggraver un trouble du sommeil sont indispensables dans la pratique courante en médecine du travail. En effet, l’insomnie est considérée comme l’un des facteurs prédictifs les plus significatifs de l’absentéisme au travail et comme le facteur prédictif majeur de la mauvaise perception du travail par le salarié 20, 21. Un
Références (21)
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Comparison of the results of the Epworth sleepiness scale and the Multiple Sleep Latency Test
J Psychosom Res
(1997) - et al.
Prevalence and consequences of sleep disorders in a shift work population
J Psychosom Res
(2002) - et al.
Sleep disturbance, work stress and work hours: a cross-sectionnal study
J Psychosom Res
(2002) - et al.
Complaints of insomnia in different occupations
Scand J Work Environ Health
(1984) - et al.
DSM-IV and ICSD insomnia symptoms and sleep dissatisfaction
Brit J Psychiat
(1997) - et al.
Prevalence of insomnia in a survey of 12 778 adults in France
J Sleep Res
(2000) - Circulaire DRT no 2005-03 du 7 avril 2005, relative à la réforme de la médecine du...
- Décret no 2002-792 du 3/05/2002 pris pour l’application des articles L.213-2, L.213-3, L.213-4, L.213-5 du Code du...
- et al.
Sleep problems: a predictor of long term disability? A four year prospective study
Scand J Public Health
(2001) - Akerstedt T. Sleep and work. State of the art lecture. XVI Congrès de l’European Sleep Research Society BVS. N° spécial...