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Le kitāb al-Taḥlīl d'Alfarabi

Published online by Cambridge University Press:  24 October 2008

Dominique Mallet
Affiliation:
Université Michel de Montaigne – Bordeaux III, Département d'études arabes et islamiques, Domaine universitaire, 33405 Talence Cedex, France

Abstract

In a departure from the tradition of the Neoplatonic commentators of the Organon, the sequence of summaries in the “Bratislava series” insert two treatises between the Prior Analytics and the Posterior Analytics, namely the Resolution (kitāb al-Taḥlīl) and the Sophistical Refutations. And even though the Taḥlīl is concerned with Book 2 of the Topics, it does not deal with dialectic. Instead, it comments on the summary of the Topics that belongs to the Prior Analytics (I, 27–30), while “completing” it. The contents of kitāb al-Taḥlīl and the different titles that the fahāris give it (e.g., fīiktisăb al-muqaddimāt), lead one to realize that it is an addition to the Prior Analytics offering a theory concerning the generation of the premisses of the syllogism, something that may have appeared to Alfarabi as missing from Kitāb al-Qiyās.

Rompant avec la tradition des commentateurs néoplatoniciens de l'Organon, la succession des copies dans la “série de Bratislava” insère entre les Premiers et les Seconds Analytiques les deux traités de la Résolution (kitāb al-Tahlīl) et des Réfutations sophistiques. Alors même qu'il suit Topiques Il, le Taḥlīl ne porte pas sur la dialectique; il commente, le “complétant,” le résumé des Topiques appartenant aux Premiers Analytiques (I, 27–30). Son contenu, ainsi que les titres différents que lui attribuent les fahāris (par ex. fi iktisāb al-muqaddimāt), conduiraient à y reconnaître une addition aux Pr. An. proposant une théorie de la génération des prémisses du syllogisme qui aura paru à Alfarabi manquer au kitāb al-Qiyās.

Type
Research Article
Copyright
Copyright © Cambridge University Press 1994

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References

1 Le kitāb al-Tahlīl et le commentaire des Réfutations figurent, respectivement, aux folios 95b–116a et 116a–136b du MS Bratislava université 231 TE 41 et aux folios 42b–52b et 52b–61a du MS Hamidiyyé 812; les références aux commentaires d'Alfarabi renvoient ici même au premier de ces deux MSS.

2 L'ordonnance traditionnelle des parties de lOrganon ne s'est pas imposée du premier coup et c'est précisément la place des Topiques qui fit la différence entre lordre usuel des néoplatoniciens et l'ordre du catalogue de Ptolémée qui place les Topiques entre le De Interpretatione et les Premiers Analytiques; Brunschwig, voyez J., “Organon-tradition grecque”, Goulet, dans R. (éd), Dictionnaire des Philosophes Antiques (Paris, 1989), vol. I, p. 486;Google Scholar voyez également Galston, Miriam S., Opinion and Knowledge in Farabi's Understanding of Aristotle's Philosophy, Ph. D. (Chicago, 1973), pp. 27.Google Scholar

3 Sīnā, Ibn, al-Šifā', al-Mantiq vol. 5, al-Burhān, éd. 'Afifi, Abū al-'Alā (Le Caire, 1956), pp. 54–6.Google Scholar

4 Grignaschi, Voyez M., “Les traductions latines des ouvrages de la logique arabe et labrégé d'Alfarabi”, Archives d'histoire doctrinale et littéraire du Moyen Age, 39 (1972): 41107;Google ScholarMahdi, M., kitāb al-Alfāz al-musta'mala fi al-mantiq (Beyrouth, 1968),Google Scholaral-muqaddima, pp. 21–4 et Galston, M.S., “Al-Fārābī et la logique aristotélicienne dans la philosophie islamique”, dans Sinaceur, M. A. (éd.), Aristote aujourd'hui (Paris, 1988), pp. 192217.Google Scholar

5 Un sondage approximatif conduit à recenser une soixantaine de titres distincts; beaucoup d'entre eux renvoient certes à des doublons, mais autant, sans doute, ne sent pas mentionnés du tout et jusqu' à leurs titres furent perdus.

6 Ta'ālīq b. Bāgga 'alā kitāb al-Burhān, dans M.T. Danèche Pajouh (éd.), al-Mantiqiyyāt li-l-Fārābī, vol. III (Qom, 1410H), pp. 294–5.

7 Voyez p. ex. 187b12–14; 220a14–220b2; 224a15–224b 6 etc.

8 L'hypothèse d'une unique origine de ces deux traités pourrait recevoir un secours appréciable de l'attribution à Alfarabi d'un Grand Commentaire des second et huitième livres du Traité de la dialectique d'Aristote (titre n° 4 dans la reproduction du recensement d'Ibn Abī Usaybi'a dans Steinschneider, M., Al Fārābī, des Arabischen Philosophen Leben und Schriften (St-Petersbourg, 1869). L'insistante multiplication de citations littérales d'Aristote à lintérieur du kitāb al-Gbreve;adal porterait à y voir les extraits d'un grand commentaire. La place réservée au huitième traité des Topiques dans ce même Gadal conduirait à y reconnaître — si l'on accepte de lui adjoindre le contenu du kitāb al-Tahlīl — l'ouvrage recensé par Ibn Abī Usaybi'a. Mais ce titre ne laisse pas d'être déconcertant: pourquoi ne signale-t-il pas au moins le premier traité plus amplement commenté que le huitième? sans doute fut-il forgé après-coup pour servir de nom à des fragments rassemblés.Google Scholar

9 Les divisions 13 à 18 (la douzième division est évoquée folio 241b), c'est-à-dire la fin du premier livre manquent à l'appel.

10 Le Tahlīl, selon toute apparence, passe sous silence II, 1 et II, 5.

11 Soit et respectivement 188a3–189b14 et 241b–248b; qui plus est, ce huitième livre réapparaît une nouvelle fois (206a–213b) mais enclavé — et non plus enclavant — entre l';explication de Top. I, 3 (204a–206a) et celle de Top. I, 4 (219b–221a).

12 Titres n° 38 abc dans Steinschneider, Al Fārābī, des Arabischen Philosophen Leben und Schriften.

13 La Muqaddima d'Ibn Haldūn consacre un chapitre à la dialectique (Ibn Haldūn, The Muqaddimah, translated from the Arabic by Rosenthal, Franz, 2e éd., 3 vol. (Londres, 1967), vol. III, pp. 32–4) bien à l'écart de celui consacré à la logiqueGoogle Scholar (ibid., pp. 137–46): il figure en bonne place au sein de l'inventaire des sciences de la tradition à la suite des hilāfiyyāt; voyez également Turki, Abdel Magid, Polémiques entre Ibn Hazm et Bāg'ī sur les Principes de la Loi musulmane (Alger, 1975), pp. 2744.Google Scholar

14 Le passage 240a7–11 ressemble à une transition. Il semble tout à la fois marquer la fin de la partie introductive du traité et annoncer le plan d'un exposé à venir qui comporterait un inventaire des lieux commençant par ceux que partagent toutes les catégories de problèmes et se continuant par ceux qui leur sont propres. D'un tel inventaire le Gadal est dépourvu. Il est raisonnable de conclure qu'au présent commentaire composé des livres I et VIII succédait un recensement perdu des lieux exposés dans les livres II–VII. Cet inventaire perdu aura très vraisemblablement répété certains des points traités dans le Tahlil et, à en juger par lusage incontinent qu'il fait de ceux des traités logiques d'Alfarabi qui nous furent transmis, Averroès s'en sera probablement inspiré pour la rédaction de son Commentaire Moyen. Il n'est pas tout à fait impossible que cette partie aujourd'hui perdue du Gadal ait été connue par al-Qiftī et qu'elle corresponde au traité qu'il recense sous le titre suivant: Traité sur les lieux tirés de la dialectique.

15 Voyez Tahlil, 101a17–18: la forme logique de la métalepse équivaut invariablement à conclure sans nécessité de la fausseté de lantécédent du syllogisme conditionnel à la fausseté de son conséquent: si le premier alors le second; or non le premier; donc non le second.

16 Il faudra rendre compte — si lon souscrit à cette raison — de lirruption du temps dans limpassibilité du Tahlil (107b6–110a15): les opinions admises, y trouve-t-on, changent d'un peuple à lautre, d'une religion à lautre et les consécutions des conduites humaines opposées et concomitantes échappent à la nécessité formelle de linférence: il est juste au deçà des Pyrénées, injuste au delà, de bien traiter ses ennemis. Ici, la vie est un bien; ailleurs, la mort est préférable. Alfarabi trace dans le Tahlil la limite qui le sépare du Gadal: la prise en considération de la matière de la dialectique, les idées “admises”.

17 L'argument demeure fragile: le kitāb al-Hatāba consacre, après tout, un long développement (éd. et trad. Langhade, J. (Beyrouth, 1971), pp. 71:1 – 81:14) à des points “extra-techniques” dont il est explicitement rappelé qu'ils n'appartiennent pas aux arguments rhétoriques. Si le kitāb al-Hatāba évoque la peur ou le pari pourquoi le Tahlil n'évoquerait-il pas la métalepse?Google Scholar

18 Gadal, 188a9–12; Topiques II, 1, 109a8–10.

19 Tahlīl, 95b6–9.

20 Titre recensé sous le n° 20 dans Steinschneider (ouvrage cité note 8); viendrait indirectement corroborer cette hypothèse la comparaison entre la traduction que propose Alfarabi dans le kitāb Ihsā’ al-‘ulūm (éd. ‘Utmān Amīn (Le Caire, 1948), p. 71) pour le grec topika et le titre signalé par Ibn Abī Usaybi'a. Pourquoi Alfarabi précise-t-il, au sujet du titre grec du traité d'Aristote: “cela signifie les lieux dialectiques”, sinon parce qu'il écrivit un ouvrage portant bien sur les lieux, mais non sur la dialectique? Al-Qiftī signale, dans les œuvres d'Alfarabi un Traité des prémisses qui correspond sans doute au même ouvrage.

21 Alfarabi's Commentary on Aristotle's ΠERI ERMENEI AΣ (De Interpretatione), éd. Kutsch, W. et Marrow, S., 2e éd. (Beyrouth, 1971), pp. 1923; éd. Danéche Pajouh dans al-Mantiqiyyāt li-i-Fārābī, vol. II, pp. 4–8;Google Scholar trad. anglaise de Zimmermann, F.W. dans Al-Farabi's Commentary and Short Treatise on Aristotle's De Interpretatione (Londres, 1981), pp. 49.Google Scholar

22 Éd. Kutsch-Marrow, pp. 19:24–20:4 et pp. 21:25–22:6.

24 Aristote termine ce texte par un renvoi explicite aux Topiques: “…mais nous avons sur tout cela donné des indications détaillées dans notre ouvrage sur la dialectique”.

25 Pr. An. I, 27, 43a20–25; Mantīq Aristū, éd. Badawi, A., 3 vol. (Le Caire, 19481952), vol. I, p. 214.Google Scholar

26 Par ailleurs, si, à l'intérieur du kitāb al-Qiyās que ces copistes nous transmettent avant la Résolution, Alfarabi avait - ainsi que le fera plus tard Averroés dans son commentaire moyen des Premiers Analytiques [éd. Charles E. Butterworth et Ahmad ‘Abd al-Magīd Harīdī (Le Caire, 1983), pp. 211–25, §§ 193–212]- résumé ce résumé des Topiques, il y aurait bien un recouvrement gênant de la Résolution et du Qiyās; or rien sur les Premiers Analytiques I, 27–30 ne figure dans le kitāb al-Qiyās (ni, d'ailleurs, dans le kitāb al-Qiyās al-sagīr).

27 Voyez Rhétorique, I, 2, 1358a10–32.

28 Tahlīl, 95b5–6.

29 Talhīs kitāb al-Gadal, Averroes Middle Commentary on Aristotle's Topics, edited by Charles E. Butterworth and Ahmad 'Abd al-Magīd Harīdī (Le Caire, 1979), §§ 51–55.

30 Ibid., § 53, p. 62, li. 9–10.

31 Alexandre, (Top., Wallies 5–21, cité dans Le Blond, J.M., Logique et méthode chez Aristote (Paris, 1939), p. 40, n. 3) rapporte la définition de Théophraste: le lieu est “un principe ou élément, à partir duquel nous connaissons les principes de chaque chose particulière, par une déduction scientifique”, quant à Alexandre, il définit le lieuGoogle Scholar (Top. II, Prooemium, Wallies 126–11) comme “archē kai aphormē epicheirēmatōn”.

32 Averroès, Talhīs kitāb al-Gadal, § 51, p. 61, li. 8–9.

33 Ibid., § 54.

34 Tahlīl, 95b12–96a1.

35 Ibid., 96a10–96b5; voyez sur les syllogismes conditionnels Gadal, 245a19–246b14.

36 Gadal, 223a4–18; voyez également Tahlīl, 95b9–12.

37 Alfarabi ajoute (223a17–18): “car notre énoncé ‘tout homme est un animal’ n’est pas lui un lieu, et notre énoncé ‘Zayd est un homme n’est pas une espèce’” Averroès s'abstient de repredre cette remarque dans un passage que pourtant il reproduit littéralement (Talhīs k. al-Gadal, § 51, p. 61:9–14). Peut-être cette ommission est-elle raisonneée: en vertu du second cas de figure “Tout homme est un animal” (A est B) pourrait bien être un lieu pour “tout homme est pourvu d'une âme” (A est b) s'il est établi par ailleurs que tout animal est pourvu d'une âme.

38 Talhīs k. al-Gadal, § 55, pp. 63:9–64:1.

* Texte de la communication présentée au Colloque “Perspectives médiévales arabes, latines, hébraïques, sur la tradition scientifique et philosophique grecque”, Paris, Institut du Monde Arabe, 31 mars-3 avril 1993.