Article original
Caractéristiques d’une population adolescente en fonction de son lieu de consultation : comparaison entre un service de psychiatrie adulte et un service de psychiatrie infanto-juvénileCharacteristics of an adolescent population under care according to its place of consultation: Comparison between an adult psychiatric department and a department of child psychiatry

https://doi.org/10.1016/j.neurenf.2012.10.005Get rights and content

Résumé

Objectif

Faire une analyse descriptive et comparative de la population adolescente consultante âgée de 15 à 20 ans dans les services de pédopsychiatrie et de psychiatrie adulte d’un même secteur géographique.

Méthodes

Il s’agit d’une étude rétrospective sur dossiers ayant pour but de comparer sur une année tous les adolescents consultants dans un service de psychiatrie adulte versus ceux consultants dans un service de pédopsychiatrie. Une grille de question a été construite spécialement pour l’étude afin de recueillir les données.

Résultats

Sur l’année 2008, 184 adolescents âgés de 15 à 20 ans ont été reçus en consultation dont 112 sur les structures ambulatoires du service infanto-juvénile et 72 sur celles du service de psychiatrie adulte. Les adolescents consultants en psychiatrie adulte sont plus âgés, adressés par des institutions, la famille ou un médecin, ils sont plus souvent déscolarisés (17 %) et ils ont reçu le plus souvent comme diagnostic un trouble de l’humeur, et des difficultés liées à l’environnement. Contrairement à ce que l’on attendait, ils n’ont pas plus d’antécédents d’hospitalisation en psychiatrie. Leur prise en charge diffère selon leur lieu de consultation. Les pédopsychiatres adressent plus souvent le patient vers un thérapeute (29 % versus 13 %) et prescrivent moins souvent de traitement médicamenteux (24 % versus 40 %) p < 0,05.

Conclusion

Les soins pour les adolescents dans les services adultes et infanto-juvénile, loin de se concurrencer, sont complémentaires. Une étude prospective sur plusieurs années ainsi que d’autres études sur d’autres secteurs géographiques permettraient de confirmer ces données.

Abstract

Aims

Describing, analyzing and comparing the teenage population from 15 to 20 years old who was consulting a psychiatrist during one year, in the pedopsychiatric and adult psychiatric services of a given geographic sector.

Methods

We conducted a retrospective survey based on the files/cases of teenagers having consulted at least once over the year 2008, in one or the other ambulatory care service. Grid-in questions were elaborated specifically for the purpose of this survey, in order to collect sociodemographic data, analyze medical courses, psychiatric histories and therapeutic support.

Results

Over the year 2008, 184 teenagers from 15 to 20 years old were admitted in consultation among which 112 on the ambulatory pedopsychiatric department and 72 on the adult psychiatric department. The consultant teenagers having in the pedopsychiatric department are younger, they were more often referred by their school institution, more than half of them were living within a single-parent family and were diagnosed a personality or a neurotic disorder, whereas teenagers consulting in adult psychiatry department were referred by institutions, their family or a doctor, are more likely to be out of school (17 %), and were more often diagnosed with mood disorder or troubles related to their environment. Against all expectations, they do not have more psychiatric history (hospitalization). However, their care differs according to where they consult. Pedopsychiatrists more often refer their patients to a therapist (29 % versus 13 %) and prescribe less often medicinal treatment (24 % versus 40 %).

Conclusion

Teenagers who are monitored in psychiatric department for adults hardly differ from those who were monitored in pedopsychiatric department. Far from competing pedopsychiatric and adult psychiatric departments are complementary. A prospective survey over several years and extra surveys covering other geographical sectors would allow to confirm these data.

Introduction

La prise en charge des adolescents suscite un engouement peu démenti depuis plusieurs années entraînant l’ouverture de structures qui leur sont spécialement dédiées. Mais jusqu’au siècle dernier les adultes et les enfants, les délinquants et les « fous » recevaient la même prise en charge. La loi du 30 juin 1838 met fin aux décisions d’internement arbitraire et souligne que des quartiers spécifiques doivent être dévolus aux enfants qui restent néanmoins au sein des asiles généraux. Les enfants délinquants, « idiots ou arriérés » et « fous » sont internés ensemble. Parmi les premiers, Bourneville (1840–1909, fondateur de la Fondation Vallée) se préoccupe d’améliorer l’accueil des enfants hospitalisés. Jusqu’au milieu du xxe siècle, les mineurs sont accueillis de manière indistincte en prison ou en hôpital psychiatrique, des « séjours d’isolement » restant autorisés par l’arrêté du 3 août 1950. Les soins psychiatriques pour enfants et adolescents se mettent en place sur le modèle de ceux pour adultes par la circulaire du 15 mars 1960. La circulaire du 16 mars 1972 instaure un hôpital de rattachement pour chaque intersecteur. Les critères d’âge sont fréquemment évoqués pour déterminer le lieu de soin d’un adolescent. La limite de 15 ans et trois mois ne correspond à aucune loi mais relève d’une circulaire interne de l’Assistance publique pour délimiter la prise en charge en service de pédiatrie. La seconde limite évoquée, celle des 16 ans, est extraite d’un décret du 14 mars 1986, reprenant des éléments d’une circulaire du 13 septembre 1961. La circulaire du 11 décembre 1992 précise que le décret du 14 mars 1986 « fixe à 16 ans la limite d’âge inférieure pour les personnes susceptibles de faire appel au secteur de psychiatrie générale » mais « ne délimite pas précisément la tranche d’âge des enfants et adolescents auxquels les secteurs de psychiatrie infanto-juvénile offrent des soins et des services » et insiste sur le fait « qu’il fait partie intégrante (de leur) mission (…) de répondre aux besoins de santé mentale des adolescents, quel que soit leur âge » [1]. Ainsi l’organisation en secteur des structures psychiatriques et les imprécisions dans les tranches d’âge délimitant leurs champs d’action amènent la population adolescente à pouvoir bénéficier de soins au sein des deux types de services : infanto-juvéniles et adultes.

Le secteur géographique concerné par cette étude, un arrondissement de Paris, est couvert par deux services de psychiatrie adulte (qui se partagent l’arrondissement) et un service infanto-juvénile. Nous avons réalisé une étude descriptive rétrospective sur dossier comparant la population de patients adolescents selon son lieu de consultation. Nous souhaitions savoir si sur un même lieu géographique, couvrant une tranche d’âge commune — les 16 à 18 ans — les adolescents consultant en psychiatrie adulte étaient différents de ceux suivis en secteur infanto-juvénile en termes de pathologie psychique, d’antécédents d’hospitalisation psychiatrique, de scolarité et de prise en charge thérapeutique. Pouvions-nous distinguer deux populations ou est-ce que nous traitions finalement les mêmes patients ?

La littérature portant sur les consultations des adolescents est abondante mais porte essentiellement sur la prise en charge thérapeutique ; il existe un article descriptif sur l’accueil des adolescents dans un centre médicopsychologique (CMP) infanto-juvénile datant de 1986 par Renard et al. [2]. Les objectifs de l’étude étaient de connaître les facteurs influençant le mode d’arrivée, la proposition thérapeutique et le succès de la prise en charge d’une population adolescente d’un centre médico-psychologique reçue sur cinq années.

Il n’y a pas, à notre connaissance, d’article publié en France comparant les populations adolescentes prises en charge dans des structures de psychiatrie adulte et infanto-juvénile.

Section snippets

Description des structures ambulatoires au sein du secteur

L’accueil des adolescents sur le secteur géographique du 16e arrondissement de Paris se fait :

  • pour le secteur infanto-juvénile sur un CMP et une antenne de consultation ambulatoire qui accueillent les patients scolarisés ou domiciliés sur l’arrondissement jusqu’à l’âge de 18 ans ;

  • pour le secteur adulte, il existe deux services de psychiatrie dont l’un possède en son sein une antenne spécifiquement dédiée : l’accueil pour adolescents et jeunes adultes (AAJA) qui reçoit les patients âgés de 16 à 23

Résultats

Durant l’année civile 2008, les deux services ont reçu en consultation 184 adolescents âgés de 15 à 20 ans. Cent douze ont consulté dans le service de pédopsychiatrie et 72 dans le service adulte qui leur est spécifiquement dédié. Cent soixante-dix-huit adolescents ont été finalement inclus dans l’étude, 106 en pédopsychiatrie et 72 dans le service adulte.

Discussion

Depuis les années 1970, on assiste à l’essor de structures spécifiquement dédiées aux adolescents. Faut-il pour autant penser que la prise en charge des adolescents est toujours identique ? Ou dépend-t-elle du contexte et de l’histoire de la structure à l’initiative de cette prise en charge ? Faut-il continuer à développer des structures spécifiques pour les adolescents ou peuvent-ils être accueillis indifféremment dans les services de psychiatrie adulte et de pédopsychiatrie ?

Pour Baldacci,

Conclusion

Notre étude descriptive rétrospective a montré que les adolescents consultants en psychiatrie adulte sont plus âgés que ceux consultant en pédopsychiatrie, ils souffrent plus souvent de troubles de l’humeur et de difficultés liées à l’entourage, ils bénéficient plus souvent d’un traitement médicamenteux et moins souvent d’une psychothérapie. Ces résultats n’ont porté que sur un secteur géographique (un arrondissement de paris), des études complémentaires et prospectives permettraient de

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

Références (20)

There are more references available in the full text version of this article.

Cited by (4)

View full text