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Modèles de conflits entre l'URSS et les autres états socialistes

Published online by Cambridge University Press:  10 November 2009

Jacques Levesque
Affiliation:
Université du Québec à Montréal

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Depuis l'émergence du socialisme (du type léniniste) hors des frontières d'un seul pays et la formation du camp socialiste è la fin de la seconde guerre mondiale, c'est-à-dire, depuis un peu plus de 25 ans seulement, de nombreux conflits ont surgi dans les relations entre l'Union Soviétique et les nouveaux Etats socialistes. Sur les 13 Etats socialistes qui existent actuellement dans le monde, outre l'urss, 8 d'entre eux, c'est-à-dire, la majorité, ont eu des conflits plus ou moins aigus selon les cas, dans leurs relations avec celleci. Ce fut d'abord, le conflit soviéto-yougo-slave de 1948, puis les crises de Pologne et de Hongrie en 1956, les conflits avec l'Albanie et la Chine qui ont commencé, ouvertement en 1960 et qui durent toujours, le conflit avec la Roumanie qui a commencé en 1962 au sujet de l'intégration économique de l'Europe de l'Est, qui a changé de forme par la suite et qui n'est peut-être pas encore terminé, le conflit avec Cuba sur la stratégie révolutionnaire en Amérique latine, qu'on peut situer de 1965 à 1968, et enfin, la crise de Tchécoslovaquie de 1968. Les moins aigus de ces conflits sont ceux qui sont survenus dans les relations de l'urss avec la Roumanie et avec Cuba.

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Copyright
Copyright © Canadian Political Science Association (l'Association canadienne de science politique) and/et la Société québécoise de science politique 1974

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References

1 Cet article représente un effort de généralisation, avec toutes les limites d'une telle entreprise, qui s'appuie sur les travaux de recherche empirique que j'ai effectués, au cours des sept dernières années, et qui ont porté sur les relations de l'urss avec la Pologne, la Chine, la Roumanie, la Tchécoslovaquie et Cuba. Ces recherches ont fait l'objet des publications suivantes où se trouvent les principales données de base, non schématisées, de cet article: Le conflit sinosoviétique et l'Europe de l'Est, (ses incidences sur les conflits soviéto-polonais et soviétoroumuins), (Montréal, 1970); « La problématique de l'intervention soviétique en Tchécoslovaquie », Socialisme 69; Le conflit sino-soviétique, 1973, (Collection « Que saisje? » ), (Paris, 1973).

2 Ce sont: la Chine, le Viet-nam du Nord, la Corée du Nord, la Mongolie extérieure, la Pologne, la Tchécoslovaquie, la Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie, l'Allemagne de l'Est, la Yougoslavie, l'Albanie et Cuba.

3 En 1919, Lénine disait: « Pour un laps de temps de courte durée, cela va de soi, l'hégémonie dans l'lnternationale prolétarienne révolutionnaire est passée aux Russes, comme à la dernière époque du XIXe siècle, elle a appartenu aux Anglais, puis aux Français, enfin aux Allemands ». « La Troisième Internationale et sa place dans l'histoire », Œuvres, tome 29, (Moscou, 1962), 13.

4 Cet état de choses était commandé par les critères staliniens de l'internationalisme qui devinrent ceux du mouvement communiste international. Ces critères ont été exposés de façon particulièrement révélatrice, par Staline lui-même dès 1927: « Est révolutionnaire, celui qui est prêt à protéger et à défendre l'urss sans réserve, sans arrière-pensée, ouvertement et honnêtement, sans conciliabules molitaires; parce que l'urss est le premier Etat prolétarien et révolutionnaire du monde, un Etat qui construit le socialisme.

Est internationaliste celui qui est disposé à défendre l'urss sans réserve, sans hésitation, inconditionnellement; parce que l'urss est la base du mouvement révolutionnaire mondial et le mouvement révolutionnaire ne peut être défendu et renforcé, si l'urss n'est pas déefendue.

Quiconque se propose de protéger le mouvement révolutionnaire international sans vouloir protéger en même temps l'URSS OU s'insurge contre elle, en fait s'insurge contre la révolution et glisse irrévocablement dans le camp des ennemis de la révolution ».

Staline, « La situation internationale et la défense de l'urss ». Œuvres, Tome 10, Editions en langues étrangères, Moscou 1954, pp. 53–4.

5 Voir Figures de Lukacs, par Yvon Bourdet (Paris 1972), 33 à 38 et, La pensée de Georg Lukacs (Toulouse, 1972), 46.

6 L'attitude de soutien inconditionnel à l'Union Soviétique existe encore de nos jours dans plusieurs partis communistes et ce, parfois, par-dessus la tête de dirigeants devenus plus critiques. Notre collègue Guy Lord qui poursuit une recherche sur l'implantation rurale du Parti communiste français et qui a interviewé plusieurs militants, a été en mesure de constater le mécontentement de beaucoup d'entre eux à l'égard de la dénonciation par la direction du Parti, de l'intervention soviétique en Tchécoslovaquie.

7 Sur la diversité relative qui a existé dans le camp socialiste jusqu'en 1947, les problèmes qu'elle a posé et les effets du conflit soviétoyougoslave sur les relations entre l'urss et les autres démocraties populaires, le lecteur consultera avec profit les ouvrages généraux de Brzezinski, Z.K., The Soviet Bloc (Cambridge, Mass., 1967)Google Scholar et de Francois Fejtö, Histoire des démocraties populaires, Tome 1, L'Ere tie Staline (Paris, 1972).

8 Pour un historique des origines et du développement de chacun de ces conflits voir, en ce qui concerne la Pologne, Zinner, Paul, National Communism and Popular Revolt in Eastern Europe, (A selection of Documents on Events in Poland and Hungary) (New York, 1957)Google Scholar; Wladyslaw Gomulka, « Discours à la VIIIe réunion plénière du Comité Central du Parti ouvrier polonais unifié », (20 octobre 1956), Notes et Etudes documentaires, no. 2232, Paris 1956; en ce qui concerne la Hongrie, Kecskemeti, Paul, The Unexpected Revolution (Stanford, 1961)Google Scholar; Fejtö, F., Budapest 1956 (Paris, 1966)Google Scholar; Molnar, Miklos, Victoire d'une défaite (Paris, 1968)Google Scholar; en ce qui concerne la Tchécoslovaquie, Selucky, Radoslav, Czechoslovakia: The Plan that Failed (London, 1960)Google Scholar; Tigrid, Pavel, Le printemps de Prague (Paris, 1970)Google Scholar; Svitak, Ivan, The Czechoslovak Tragedy (New York, 1970).Google Scholar

9 Sur les origines de ces conflits, voir, en ce qui concerne la Yougoslavie, Ulam, Adam B., Titoism and the Kominform (Cambridge, Mass., 1952)CrossRefGoogle Scholar; en ce qui concerne l'Albanie, Griffith, William E., Albania and the Sino-Soviet Conflict (Cambridge, Mass., 1964)Google Scholar; en ce qui concerne la Chine, la littérature est extrêmement abondante, indiquons seulement Zagoria, Donald S., The Sino-Soviet Conflict (Princeton, 1962)Google Scholar et Débat sur le mouvement communiste international (Pékin, 1965); en ce qui concerne la Roumanie, Fischer-Galati, Stephen, The New Rumania (Cambridge, 1967)Google Scholar, et Floyd, David, Rumania, Russia's Dissident Ally (London, 1964)Google Scholar; en ce qui concerne enfin Cuba, Suarez, Andres, Cuba: Castroism and Communism (Cambridge, 1967)Google Scholar, et Jackson, D. Bruce, Castro the Kremlin and Communism in Latin America (Baltimore, 1969).Google Scholar

10 Le problème des tensions résultant de la mésadaptation du modèle soviétique s'est posé surtout aux pays de l'Europe de l'Est ou le pouvoir communiste a été installé par l'Armée rouge et où les partis communistes étaient en conséquence plus dépendants de l'Union Soviétique et plus étroitement soumis à ses exigences. Dans chacun de ces pays, il s'est cependant posé dans des termes et à des degrés différents. Dans Le conflit sinosoviétique et l'Europe de l'Est, j'ai tenté de montrer comment les conditions économiques, culturelles et sociales de la Bulgarie et de la Roumanie pouvaient expliquer une adaptation plus facile du modèle soviétique. II faudrait expliquer aussi le cas de l'Allemagne de l'Est, où « l'élève a maintenant dépassé le maître ».

11 II y a ici matière à discussion et nécessité de nuancer amplement. En effet l'expérience des conseils ouvriers en Pologne, en 1956, ne saurait en aucune façon être qualifiée d'expérience de « droite ». Du même plusieurs projets formulés et mis en pratique en Tchécoslovaquie se voulaient un retour au marxisme et au léninisme authentiques. Il était d'usage en Tchécoslovaquie (comme c'est aussi le cas dans d'autres pays socialistes) de qualifier de droite ou de conservateur les défenseurs de l'ordre stalinien. En fait, notre distinction entre gauche et droite se réfère surtout à des critères soviétiques, officiels.

12 Les projets de Khrouchtchev furent exposés sous leur forme la plus achevée dans un article « Les questions vitales du développement du système socialiste mondial », Kommunist, no 12 (août 1962), 3–27. Cet article proposait la transformation du Começon en un organisme supranational de planification. II allait done beaucoup plus loin que les exigences de coordination et de spécialisation des plans de développement des pays membres, auxquelles la Roumanie résistait déjà, passivement, depuis 1960–1.

13 Dans le cas des dirigeants cubains, la tradition stalinienne ne joue évidemment pas. II s'agit ici d'un mouvement et d'un militantisme « sui generis ».

14 Piao, Lin, Vive la victorieuse guerre du peuple (Pékin, 1965).Google Scholar

15 Elle chercha à limiter le conflit, notamment en évitant la polémique idéologique ouverte et sa dynamique d'accélération.

16 Révolution dans la Révolution (Paris, 1966).

17 Des communistes polonais et roumains qui ont été en relations avec les dirigeants soviétiques, nous ont indiqué que ceux-ci accordaient une très grande importance aux individus dirigeants dans les autres pays socialistes. Cette attitude paradoxale à prime abord, s'explique par l'expérience soviétique du centralisme et d'une concentration extrêmement grande du pouvoir, qui les amène à considérer qu'un changement d'homme à la direction d'un parti communiste peut amener des changements politiques assez considérables.

18 Bogomolov, Oleg, « Les principes fondamentaux de la division internationale du travail », Voprosy Ekonomiki (novembre, 1966).Google Scholar

19 Voir le recueil des discours prononcés par Fidel Castro à cette occasion, publié aux Editions François Maspéro, Paris 1972. Il faudra maintenant surveiller les conclusions politiques que les dirigeants cubains pourraient tirer des récents événements au Chili.

18 Une lecture attentive des documents officiels et des discours des principaux dirigeants chinois (qu'on peut trouver en traduction dans Pékin Information et Survey of China Mainland Press) entre 1967 et 1970, révàle que sans être critiqué explicitement (la Roumanie, elle l'a été à Pékin Information, no. 12, 25 mars 1968, p. 9), le Viet-nam du Nord et la Corée du Nord n'étaient plus qualifiés de socialistes; de toute évidence à cause de leur refus de dénoncer l'Union Soviétique. Cette exigence a maintenant disparu pour ces pays qui sont de nouveau reconnus comme socialistes, le dernier en date étant la Roumanie, depuis le voyage de N. Ceausescu à Pékin en 1971.

21 Voir là-dessus, le récent ouvrage de Schaefer, Henry W., Comecon and the politics of Integration (New York, 1972).Google Scholar

22 Voir, Bromke, Adam, « Poland under Gierek », Problems of Communism, (Sept–Oct. 1972), 119.Google Scholar