Rapports sur la santé
Le lien entre les quartiers ayant un bon potentiel piétonnier et l’activité physique tout au long de la vie

par Rachel C. Colley, Tanya Christidis, Isabelle Michaud, Michael Tjepkema et Nancy A. Ross

Date de diffusion : le 18 septembre 2019

DOI : https://www.doi.org/10.25318/82-003-x201900900001-fra

L’activité physique est positivement associée à un vaste éventail de résultats en matière de santé physique, psychologique, sociale et cognitive chez les enfants, les jeunes et les adultesNote 1Note 2Note 3Note 4. Les statistiques nationales les plus récentes indiquent que la majorité de la population canadienne ne respecte pas les niveaux recommandés d’activité physiqueNote 5Note 6 et que les niveaux d’activité physique sont demeurés stables au cours de la dernière décennieNote 7Note 8. La nécessité d’accroître les niveaux d’activité physique au sein de la population a entraîné des appels visant à relever les aspects de l’environnement bâti contribuant positivement à l’activité physique et à la santéNote 9Note 10. Le caractère propice à l’activité d’un quartier est généralement évalué à l’aide du potentiel piétonnier, qui est une mesure de la façon dont la forme bâtie d’un quartier favorise la marche. Le potentiel piétonnier consiste généralement en plusieurs sous-composantes, y compris la proximité aux destinations d’intérêt (p. ex., magasins, services, lieux de travail, écoles), la connectivité des rues (nombre d’intersections, options d’itinéraire, caractère direct des itinéraires) et la densité résidentielle (qui peut soutenir les destinations d’intérêt). La Base de données sur l’accessibilité à la vie active dans les milieux de vie au Canada (AVA-Can), indice de potentiel piétonnier récemment élaboré, est un ensemble de mesures fondées sur la géographie qui représente la convivialité de l’accès à la vie active ou le potentiel piétonnier des collectivités canadiennesNote 11.

Des examens systématiques signalent des preuves constantes d’une association entre des aspects de l’environnement bâti et l’activité physique des adultesNote 12Note 13Note 14Note 15 et cette association est évidente dans le contexte canadienNote 16Note 17Note 18Note 19Note 20Note 21Note 22Note 23Note 24. Le lien entre l’environnement bâti et l’activité physique est plus souvent relevé pour la marche liée au transport et la marche utilitaire que pour la marche récréativeNote 13Note 15Note 16Note 17Note 19Note 22Note 23Note 24. Une limite des études antérieures est de se fier à des mesures subjectives de l’activité physique qui ne distinguent pas toujours divers types et domaines d’activité physique. Deux enquêtes sur la santé de Statistique Canada (l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes [ESCC] et l’Enquête canadienne sur les mesures de la santé [ECMS]) ont désormais recours à un questionnaire commun sur l’activité physique dans lequel il est demandé à la population canadienne de déclarer le temps qu’elle consacre à des activités physiques dans le cadre de divers domaines, y compris le transport, les loisirs, l’école (le cas échéant) ainsi que le travail et les tâches ménagères. Les données de ce questionnaire, combinées aux données sur l’activité physique mesurées par accéléromètre dans l’ECMS, créent une occasion unique d’examiner étroitement les associations entre le potentiel piétonnier et l’activité physique.

La majorité des preuves établissant le lien entre l’environnement bâti et l’activité physique et la santé porte sur les adultes et les adultes plus âgés, et ces relations sont moins comprises pour les enfants et les jeunes. D’Haese et ses collègues n’ont relevé aucune association entre le potentiel piétonnier d’un quartier et l’activité physique d’enfants belgesNote 25. McGrath et ses collègues ont indiqué que les enfants vivant dans des quartiers présentant davantage d’espaces verts, de rues attrayantes et des résultats inférieurs en matière de potentiel piétonnier accumulaient une plus grande activité physique modérée à vigoureuse (APMV)Note 26. Janssen et King ont signalé que les enfants canadiens vivant dans des quartiers à faible potentiel piétonnier étaient plus susceptibles que les enfants vivant dans des quartiers à potentiel piétonnier élevé de participer à des activités physiques sur leur temps libre en dehors de l’école et à atteindre les niveaux recommandés d’activité physiqueNote 27. Des résultats mixtes ont été obtenus pour les jeunes canadiens. Le potentiel piétonnier et des espaces verts, par exemple, étaient négativement associés à l’activité physiqueNote 28 et la ville tentaculaire (tendance de développement associé à une moindre activité physique chez les adultes) était associée positivement à l’activité physique des jeunesNote 29.

La présente étude vise à examiner la manière dont l’association entre le potentiel piétonnier (ou un « environnement propice à l’activité ») et l’activité physique de la population canadienne varie tout au long de la vie, selon divers domaines d’activité physique, en combinant la base de données AVA-Can et deux enquêtes sur la santé représentatives à l’échelle nationale.

Méthodes

Le Fichier de conversion des codes postaux plus (FCCP+ 7A) a été utilisé pour joindre la Base de données sur l’accessibilité à la vie active dans les milieux de vie au Canada (AVA-Can) de 2016 (limitée aux zones non rurales) à l’échantillon de mesures par accéléromètre des cycles 2, 3 et 4 de l’Enquête canadienne sur les mesures de la santé (ECMS de 2009 à 2015). Le FCCP+ a servi à obtenir une date de référence (2016) d’aire de diffusion (AD) reflétant plus étroitement l’enquête que ce que fournissait le fichier de l’enquête (2011). La présente analyse se fonde sur un échantillon de 10 987 répondants pour lesquels des données d'activité physique valides mesurée par accéléromètre et, parmi ceux-ci, des données AVA-Can étaient disponibles. L’activité physique a été mesurée dans l’ECMS à l’aide de l’accéléromètre Actical. Un échantillon distinct de données d’activité physique déclarées par les parents (activité non organisée, organisée et à l’école) pour les enfants âgés de 3 à 11 ans (n = 4 030) a été créé à partir de l’échantillon initial de l’ECMS des ménages et de la clinique pour cette tranche d’âge (n = 4 883).

Le FCCP+ 7A a été utilisé pour joindre la base de données AVA-Can de 2016 (limitée aux zones non rurales) à l’Enquête sur la santé dans les collectivités (ESCC de 2015 à 2016). L’échantillon initial de l’ESCC (n = 110 095) comptait environ 4 % de données manquantes sur l’activité physique (n = 3 248) ou non valides (n = 971). La présente analyse se fonde sur 105 876 répondants âgés de 12 ans et plus pour lesquels des données d’activité physique valides autodéclarées sont disponibles. On a utilisé des données sur l’activité physique autodéclarée par type (liée au transport, aux loisirs, à l’école ainsi qu’aux tâches ménagères et au travail) pour les jeunes et les adultes (âgés de 12 ans et plus) provenant de l’ESCC.

Enquête canadienne sur les mesures de la santé et Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes

L’ECMS est une enquête transversale permanente menée par Statistique Canada pour recueillir des renseignements sur la santé, mesurés et déclarés, auprès d’un échantillon représentatif de la population canadienne à domicile âgée de 3 à 79 ans (représentant environ 97 % de la population), grâce aux centres d’examen mobiles se rendant à plusieurs sites (cycle 2 : 18 sites; cycle 3 : 16 sites; cycle 4 : 16 sites) dans l’ensemble du pays, à l’exception des territoiresNote 30Note 31Note 32. L’ESCC est une enquête transversale permanente menée par Statistique Canada qui permet de recueillir des renseignements autodéclarés sur l’état de santé, l’utilisation des services de santé et les déterminants de la santé au sein de la population canadienne et qui couvre environ 98 % de la population canadienne âgée de 12 ans et plusNote 33.

Base de données sur l’accessibilité à la vie active dans les milieux de vie au Canada (AVA-Can)

La base de données AVA-Can est un ensemble de mesures fondées sur la géographie qui représente la convivialité de l’accès à la vie active des collectivités canadiennesNote 11Note 34. Les cotes z de trois facteurs ont été incluses à la base de données AVA-Can de 2016 : la densité des intersections, la densité d’habitat et les points d’intérêt. Une mesure d’indice résumée (la somme des cotes z pour chacune des mesures d’AVA; l’indice AVA) et une mesure catégorielle de l’aspect favorable de l’accessibilité à la vie active dans les milieux de vie (de 1, l’accès le moins convivial à la vie active et le potentiel piétonnier le plus bas, à 5, l’accès le plus convivial à la vie active et le potentiel piétonnier le plus élevé; la catégorie AVA) sont également incluses à cette base de données. Une classification automatique (approche par k-moyennes) a servi à attribuer chaque AD à l’un des cinq groupes. Ces mesures se fondent sur des régions tampons d’un kilomètre à partir des centroïdes des AD du Recensement de 2016. Les AD sont de petites unités géographiques définies par Statistique Canada qui englobent généralement une population de 400 à 700 personnes. La densité des intersections a été dérivée à l’aide des caractéristiques de route et sentiers, provenant du Fichier du réseau routier de Statistique Canada et d’OpenStreetMap et représente le nombre d’intersections à trois voies (ou plus) au sein d’une région tampon d’un kilomètre autour du centroïde de l’AD. La densité d’habitat a été calculée à l’aide des données de recensement de Statistique Canada et capture la densité des logements des AD au sein de la région tampon. La mesure des points d’intérêt capture le nombre de destinations de marche potentielles (p. ex., parcs, écoles, magasins, établissements commerciaux et monuments) au sein de la région tampon d’un kilomètre. Vous trouverez une description des différentes catégories de la base de données de l’AVA-Can ci-dessous.

Fichier de conversion des codes postaux plus (FCCP+)

Le Fichier de conversion des codes postaux plus (FCCP+) est constitué d’un programme de contrôle SAS© ainsi que de plusieurs ensembles de données connexes provenant du Fichier de conversion des codes postaux (FCCP), d’un fichier de la pondération de la population par codes postaux, du Fichier des attributs géographiques, de fichiers des limites des régions sociosanitaires et d’autres données supplémentaires. Le FCCP+ version 7ANote 35 a servi à attribuer une AD de 2016 à chaque code postal de répondant aux enquêtes ESCC et ECMS, pour le joindre à la base de données de l’AVA-Can. Du fait de problèmes de précision du géocodage dans les régions ruralesNote 35Note 36, les répondants vivant dans une région rurale ou une petite ville ont été exclus de cette analyse à l’aide de la variable de taille de la collectivité (CSize < 5). La taille des collectivités est définie selon la population du Recensement de 2016 dans chaque région métropolitaine de recensement (RMR) ou agglomération de recensement (AR). La taille de collectivité 1 comprend Toronto, Montréal et Vancouver; la taille de collectivité 2 comprend Ottawa–Gatineau, Edmonton, Calgary, Québec, Winnipeg et Hamilton; la taille de collectivité 3 comprend toutes les 18 autres RMR et sept des plus grandes AR; la taille de collectivité 4 comprend toutes les 106 autres AR; et la taille de collectivité 5 comprend tous les lieux non inclus dans une RMR ou AR et représente les régions rurales et les petites villes du Canada.

Activité physique mesurée par accéléromètre (Enquête canadienne sur les mesures de la santé)

À la suite d’un questionnaire auprès des ménages, les participants ont effectué une série de mesures physiques au centre d’examen mobile de leur ville ou à proximité de celle-ci. À la fin de la visite au centre d’examen mobile, on a demandé aux répondants ambulatoires de porter un accéléromètre Actical (Phillips Respironics, Oregon, États-Unis) retenu par une ceinture élastique sur la hanche droite durant leurs heures d’éveil pendant sept jours consécutifs. Les répondants ne pouvaient voir aucune donnée au cours du port de l’appareil. L’Actical mesure et enregistre l’accélération horodatée, dans toutes les directions, fournissant ainsi un indice de l’intensité de l’activité physique au moyen d’un nombre de mouvements pour chaque minute. Une journée valide a été définie comme comptant 10 heures ou plus de temps de port; un répondant valide a été défini comme une personne enregistrant au moins 4 jours validesNote 37. Le temps de port a été déterminé en soustrayant de 24 heures le temps pendant lequel l’appareil n’avait pas été porté. Le temps de non-port désignait une période d’au moins 60 minutes consécutives sans dénombrement de mouvements, sauf pour un intervalle d’une à deux minutes enregistrant un nombre de mouvements situé entre 0 et 100. Les seuils d’intensité du mouvement publiés ont été appliqués aux données, afin de dériver la durée de toute activité physique d’intensité légère (APIL) et modérée à vigoureuse (APMV)Note 38Note 39Note 40. Une description complète des procédures de réduction des données d’accéléromètre est disponible dans un autre documentNote 37.

Activité physique autodéclarée (Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes)

On a demandé aux répondants de l’ESCC âgés de 12 ans et plus de fournir des estimations du temps qu’ils avaient consacré, au cours des sept jours précédents, à des activités physiques liées au transport, aux loisirs, à l’école ainsi qu’au travail et à des tâches ménagères. Les valeurs déclarées par domaine ont été résumées pour déterminer leur activité physique totale. Un examen de la relation entre ce module de questionnaire autodéclaré et l’activité physique mesurée par accéléromètre est disponible dans d’autres documents pour les adultesNote 41 et les jeunesNote 42.

Activité physique déclarée par les parents (Enquête canadienne sur les mesures de la santé)

On a demandé aux parents des répondants à l’ECMS âgés de 3 à 11 ans d’estimer le nombre d’heures par semaine que leur enfant consacrait normalement à une activité physique qui l’essouffle ou le fait avoir chaud plus que d’habitude dans ses temps libres à l’extérieur de l’école lors d’activités non organisées, seul ou avec des amis. Un examen de la relation entre ce module de questionnaire de données déclarées par les parents et l’activité physique mesurée par accéléromètre est disponible dans d’autres documentsNote 43.

Analyse statistique

Des statistiques descriptives non corrigées ont été utilisées pour calculer les moyennes et les intervalles de confiance à 95 % de chaque variable d’activité physique par catégorie AVA-Can. Des contrastes par pair ont servi à comparer l’activité physique par catégorie AVA-Can. Des analyses de tendance ont permis d’évaluer les tendances linéaires à la hausse ou à la baisse de l’activité physique pour les cinq catégories de potentiel piétonnier. Des modèles de régression linéaire distincts pour chaque variable d’activité physique (mesurée par accéléromètre, autodéclarée et déclarée par les parents) ont été créés pour toutes les tranches d’âge (3 à 4 ans, 5 à 11 ans, 12 à 17 ans, 18 à 39 ans, 40 à 59 ans et 60 à 79 ans pour l’ECMS ainsi que 60 ans et plus pour l’ESCC), afin d’évaluer l’association entre l’indice de potentiel piétonnier (indice AVA; variable continue) et l’activité physique. Les modèles de régression linéaire de l’ECMS (c.-à-d., données d’activité physique mesurée par accéléromètre et déclarée par les parents) ont tenu compte de l’âge, du sexe, du revenu du ménage et du niveau de scolarité du ménage. Les modèles de régression linéaire de l’ESCC ont tenu compte de l’âge, du sexe, du revenu du ménage et du niveau de scolarité du ménage, à l’exception de l’échantillon des jeunes (âgés de 12 à 17 ans), tenant uniquement compte de l’âge, du sexe et du revenu du ménage. L’APMV, mais non l’APIL ni le nombre de pas, a été log-transformée dans les modèles de l’ECMS. Toutes les variables d’activité physique autodéclarée ont été log-transformées dans les modèles de l’ESCC. Toutes les analyses ont été pondérées à l’aide des poids de sondage de cycle combinés générés par Statistique Canada pour les cycles 2, 3 et 4 de l’ECMSNote 30Note 31Note 32et pour l’ESCC de 2015 à 2016Note 33. Les analyses ayant recours aux données d’accéléromètre ont été pondérées avec les poids de sous-échantillons donnés, alors que les données déclarées par les parents et autodéclarées ont été pondérées à l’aide des poids complets des ménages. Les données ont été analysées à l’aide de SAS 9.3 (SAS Institute, Cary, Caroline du Nord) et SUDAAN 11.0 au moyen d’un dénominateur de degré de liberté (DDF = 35) dans les énoncés de procédure de SUDAAN pour les analyses de l’ECMS. Afin de tenir compte des effets du plan de sondage, des intervalles de confiance à 95 % ont été estimés par la méthode du bootstrap. Au sein des ménages sélectionnés aux cycles 2, 3 et 4 de l’ECMS, entre 74,1 % et 76,4 % ont fourni des renseignements sur la composition de leur ménage, entre 88,4 % et 91,5 % ont participé à l’enquête auprès des ménages et entre 77,2 % et 81,7 % ont effectué les mesures physiques à un centre d’examen mobile; ce qui a entraîné un taux de réponse combiné global situé entre 51,7 % et 55,5 %. Le taux de réponse pour le sous-échantillon de mesures par accéléromètre (reflétant l’exigence analytique de présenter au moins quatre jours valides de données d’accéléromètre)Note 30Note 31Note 32 a été d’environ 40 % pour tous les cycles. Le taux de réponse pour l’ESCC de 2015 à 2016 a été de 57,5 %Note 33.

Résultats

Un aperçu des variables d’activité physique et de la répartition selon les catégories AVA-Can est présenté par tranche d’âge au tableau 2 pour l’ECMS et l’ESCC. L’activité physique diminue généralement avec l’âge et est supérieure dans les données autodéclarées à celle des données mesurées par accéléromètre. La répartition selon les catégories AVA-Can a été relativement constante selon les tranches d’âge pour les deux échantillons.

Activité physique mesurée par accéléromètre

Une tendance linéaire à la hausse significative était évidente pour l’APMV pour toutes les catégories AVA-Can pour les adultes, mais pas pour les enfants ni les jeunes (figure 1). Des contrastes par pair entre l’APMV et les catégories AVA-Can 2, 3, 4 et 5 et entre l’APMV et la catégorie 1 sont signalés à la figure 1. L’APIL n’a pas varié selon les catégories AVA-Can, à l’exception d’une tendance linéaire à la baisse significative de l’APIL pour les jeunes âgés de 12 à 17 ans (données non présentées). Le nombre de pas quotidiens moyens n’a varié, selon les catégories AVA-Can, dans aucune tranche d’âge (données non présentées). Les modèles de régression linéaire (tenant compte de l’âge, du sexe, du revenu et du niveau de scolarité) ont indiqué que le potentiel piétonnier (indice AVA-Can) était associé positivement à l’APMV des jeunes et des adultes (tableau 2). Le potentiel piétonnier était associé négativement avec l’APIL des jeunes et des adultes plus âgés et était associé positivement uniquement au nombre de pas quotidiens moyens des adultes d’âge moyen (tableau 3).

Activité physique autodéclarée des jeunes et des adultes

Une tendance linéaire à la hausse de l’activité physique autodéclarée liée au transport selon les catégories AVA-Can s’est clairement dessinée pour les jeunes et les adultes (figure 2a). Aucune tendance linéaire n’est apparue selon les catégories AVA-Can pour l’activité physique autodéclarée liée aux loisirs (figure 2b). Une tendance linéaire à la baisse de l’activité physique autodéclarée liée aux tâches ménagères et au travail selon les catégories AVA-Can s’est clairement dessinée pour les jeunes et les adultes (figure 2c). Aucune tendance linéaire générale n’a été relevée dans aucune direction pour l’activité physique autodéclarée totale (figure 2d). Les modèles de régression linéaire (tenant compte de l’âge, du sexe, du revenu et du niveau de scolarité) ont indiqué que le potentiel piétonnier était associé positivement à l’activité physique liée au transport pour les jeunes et les adultes et était associé positivement à l’activité physique totale des adultes uniquement (tableau 3). Le potential piétonnier était associé négativement à l’activité physique liée au travail et aux tâches ménagères chez les adultes. Le potentiel piétonnier n’était pas associé à l’activité physique liée aux loisirs.

Activité physique déclarée par les parents d’enfants âgés de 3 à 11 ans

Aucune différence n’a été relevée dans l’activité physique déclarée par les parents entre les catégories AVA-Can pour les enfants d’âge préscolaire (3 à 4 ans) (données non présentées). Pour les enfants âgés de 5 à 11 ans, une tendance linéaire à la baisse entre les catégories AVA-Can s’est clairement dessinée pour l’activité physique non organisée en dehors de l’école (figure 3). Les enfants vivant dans la catégorie AVA-Can ayant le meilleur potentiel piétonnier accumulaient 10 minutes d’activité physique non organisée de moins que ceux vivant dans la catégorie AVA-Can ayant le moins bon potentiel piétonnier. Des modèles de régression linéaire (tenant compte de l’âge, du sexe, du revenu et du niveau de scolarité) ont indiqué que le potentiel piétonnier était associé négativement à l’activité physique déclarée par les parents pour les enfants âgés de 5 à 11 ans (tableau 2).

Discussion

En combinant les données d’activité physique, mesurée par accéléromètre, autodéclarées et déclarées par les parents, de deux grandes enquêtes canadiennes sur la santé représentatives à l’échelle nationale à une nouvelle mesure canadienne du potentiel piétonnier (AVA-Can), la présente étude a confirmé la variation de l’association entre le potentiel piétonnier et l’activité physique selon l’âge et le type d’activité. Le potentiel piétonnier était associé positivement à l’APMV mesurée par accéléromètre chez les jeunes et les adultes, alors qu’il était associé négativement à l’APIL des jeunes et des adultes plus âgés. Le potentiel piétonnier était associé positivement à l’activité physique autodéclarée liée au transport chez les jeunes et les adultes. Le potentiel piétonnier était associé négativement à l’activité physique non organisée déclarée par les parents chez les enfants âgés de 5 à 11 ans et les enfants vivant dans les quartiers présentant le meilleur potentiel piétonnier, qui accumulaient 10 minutes d’activité physique de moins (en moyenne) que ceux vivant dans les quartiers ayant le pire potentiel piétonnier.

À l’aide de données sur l’activité physique mesurée par accéléromètre, la présente étude corrobore une abondante documentation canadienne soutenant une association positive entre le potentiel piétonnier et l’activité physique des adultesNote 16Note 17Note 18Note 19Note 20Note 21Note 22Note 23Note 24 et une relation moins probante chez les enfantsNote 25Note 26Note 27Note 28Note 29. Une étude publiée par Janssen et King en 2015, « Walkable school neighborhoods are not playable neighborhoods », a souligné que les caractéristiques améliorant vivement le potentiel piétonnier d’un quartier (p. ex., densité élevée, zone résidentielle et commerciale mixte) pouvaient présenter des obstacles aux jeux libres en plein air des enfantsNote 27. L’APMV mesurée par accéléromètre n’a pas été associée au potentiel piétonnier dans la présente étude. De plus, l’activité physique non organisée en dehors de l’école (p. ex., jeux libres) diminuait avec chaque niveau croissant de potentiel piétonnier. Ce dernier, selon sa définition actuellement typique (p. ex., densité, connectivité et destinations), peut ne pas être un concept pertinent pour les enfants. D’autres caractéristiques de l’environnement bâti soutenant le caractère propice aux jeux (p. ex., présence de parcs, d’espaces verts, d’espace ouvert, de rues paisibles) sont probablement plus appropriées pour expliquer l’activité physique des enfantsNote 26. Comme le soulignent Janssen et King, de plus amples recherches sont nécessaires pour relever et étudier les caractéristiques et la conception de l’environnement bâti encourageant l’activité physique de toutes les tranches d’âgeNote 27. De plus, la contribution de l’environnement bâti, en ce qui concerne l’effet de taille relatif à d’autres valeurs explicatives de comportement d’activité physique chez les enfants (p. ex., modèles parentaux et soutien), est un point important à prendre en compteNote 25Note 44.

La relation entre le potentiel piétonnier et l’activité physique était plus forte chez les adultes plus jeunes que chez les adultes plus âgés. De plus, le potentiel piétonnier était associé négativement à l’APIL des adultes plus âgés. Un examen systématique se concentrant sur les adultes plus âgés a suggéré que de nombreux corrélats entre l’environnement bâti et l’activité physique des adultes plus âgés ne sont actuellement pas capturés dans les définitions traditionnelles du potentiel piétonnier, notamment la sécurité, la criminalité, l’accès aux installations récréatives, l’accès aux parcs et aux espaces publics ouverts, la verdure et un paysage esthétiquement agréable, l’infrastructure propice à la marche et l’accès aux transports en communNote 12. Un angle potentiel d’études futures serait de relever les caractéristiques uniques de l’environnement bâti propice à l’activité physique (y compris l’APIL) chez les adultes plus âgés.

Le résultat indiquant que le potentiel piétonnier n’était pas associé à l’activité physique liée aux loisirs reflète d’autres conclusions d’étudesNote 13Note 15Note 16Note 17Note 19Note 22Note 23Note 24. Un récent examen systématique a signalé que la majorité des études incluses dans l’examen ont relevé une association nulle (97 % des études) ou négative (3 % des études) entre l’activité physique liée aux loisirs et le potentiel piétonnierNote 19. Ce même examen a relevé que la majorité (67 %) des études incluses dans l’examen notaient une association positive entre le potentiel piétonnier et l’activité physique liée au transport. Cette conclusion reflète également le travail de Thielman et de ses collègues, qui ont signalé un écart similaire entre l’activité physique liée aux loisirs et celle liée au transport et ont suggéré que les gains de dépenses énergétiques quotidiennes obtenus d’un moyen de transport actif pouvaient être annulés par une moindre activité physique liée aux loisirs, pour certaines tranches d’âgeNote 24. Le concept de potentiel piétonnier a été conçu pour inclure des caractéristiques de l’environnement bâti facilitant l’activité physique aux fins de transport. Ces caractéristiques sont probablement très différentes de celles associées à l’activité physique liée aux loisirs et au temps libre, comme des sentiers de marche esthétiquement agréables et une circulation réduite. Ces résultats incohérents quant au potentiel piétonnier et à l’activité physique ont mené à des études explorant de nouvelles caractéristiques d’environnement bâti, comme la réduction des parcs de stationnement, les retraits, ainsi que le fait d’accroître le couvert végétal au niveau des ruesNote 45. De futurs indices de potentiel piétonnier incluront probablement des caractéristiques supplémentaires ou différentes d’environnement bâti, qui pourraient modifier l’intensité et la direction des associations avec l’activité physique.

Il est difficile de replacer dans le contexte de travaux antérieurs le résultat du potentiel piétonnier associé négativement à l’activité physique liée au travail et aux tâches ménagères, car il n’existe pas beaucoup d’études avec lesquelles procéder à une comparaison. Cela découle en partie de la question unique du questionnaire regroupant les domaines du travail et des tâches ménagères. Ce domaine combiné dans les questionnaires sur l’activité physique utilisés par Statistique Canada a été inclus pour répondre aux besoins de surveillance visant à comprendre la répartition de l’activité physique dans le cadre de divers aspects de la vie (loisirs, transport ainsi que tâches ménagères et travail). Des études antérieures ont indiqué que le domaine des tâches ménagères et du travail ne correspondait pas bien à l’APMV mesurée par accéléromètre, mais correspondait à l’APIL mesuréeNote 41. D’autres études sont nécessaires pour comprendre ce domaine et déterminer si le travail et les tâches ménagères devraient être regroupés en une seule catégorie comme c’est le cas actuellement. Il est possible que l’activité physique des ménages (p. ex., les tâches ménagères et le jardinage) puisse être inférieure dans les zones urbaines où les résidences et les propriétés sont généralement de plus petite taille. Il est difficile de spéculer sur la raison expliquant pourquoi l’activité physique liée au travail serait inférieure dans les zones à meilleur potentiel piétonnier et d’autres études examinant des covariables à un niveau plus individuel et au niveau du quartier seraient nécessaires. De plus, il serait intéressant d’examiner si les personnes s’adonnant à certains types d’activité physique sont plus ou moins susceptibles de s’adonner à des activités physiques liées aux autres domaines. Par exemple, les personnes prenant régulièrement part à des activités physiques récréatives sont-elles plus ou moins susceptibles de se rendre au travail à pied ou à vélo? Ou les personnes ayant des professions très actives sont-elles plus ou moins portées à prendre part à des activités physiques liées au transport et aux loisirs?

Forces et limites

Jusqu’à présent, la majorité des recherches effectuées sur l’association entre le potentiel piétonnier et l’activité physique se sont concentrées soit sur les adultes soit sur les enfants, se sont limitées à de petites zones géographiques ou se sont fiées à des données d’activité physique déclaréeNote 19. La présente étude a examiné cette relation dans le cadre d’une seule analyse pour un vaste éventail de tranches d’âge, à l’aide de deux échantillons de la population canadienne représentatifs à l’échelle nationale, ayant recours à la fois à des approches de mesure de l’activité physique directe et déclarée. L’ensemble de données AVA-Can est un nouvel ensemble canadien de mesures fondées sur la région géographique intégrant des sources de données de qualité, ouvertes et à utilisation gratuite. Aucun travail épidémiologique descriptif sur l’activité physique utilisant cette nouvelle mesure de potentiel piétonnier n’est actuellement accessible dans la documentation publiée. La présente étude fournit un aperçu général de l’association entre cette nouvelle mesure de potentiel piétonnier (ou le caractère propice à l’activité) et l’activité physique de la population canadienne. L’une des forces de l’étude actuelle est qu’elle a recours à la fois à des approches de données autodéclarées et mesurées par accéléromètre. Les résultats par accéléromètre ont fourni un compte rendu robuste et sans biais de la relation entre le potentiel piétonnier et l’activité physique, alors que les données autodéclarées sont essentielles pour comprendre les nuances contextuelles de la relation entre ces deux notions.

La présente étude a examiné la relation entre le potentiel piétonnier et l’activité physique à l’aide d’analyses de tendances non corrigées et de modèles de régression corrigés. Les covariables incluses dans les modèles de régression de cette étude ont été limitées à l’âge, au sexe, au revenu et au niveau de scolarité. Les modèles de régression corrigés ont en grande partie corroboré les analyses de tendance non corrigées. Il serait important dans une étude ultérieure de déterminer et d’examiner d’autres covariables au niveau individuel. De plus, davantage de travail est nécessaire pour examiner la façon dont les variables propres aux quartiers associées au revenu, à la sécurité et aux données démographiques influent sur l’association entre le potentiel piétonnier et l’activité physique. Un sujet méritant d’être davantage exploré est la catégorie de potentiel piétonnier la plus élevée, puisqu’elle présentait un nombre relativement plus réduit de répondants enregistrant des habitudes d’activité physique très différentes du reste de la population. Une autre limite de cette étude ainsi que du travail antérieur est la conception transversale et le manque de correction par rapport à l’autosélection résidentielleNote 19. Si des personnes choisissent de vivre dans un quartier propice à leurs habitudes existantes d’activité physique, cela peut entraîner une surestimation de la force de l’association entre le potentiel piétonnier et l’activité physiqueNote 46. Une étude longitudinale suivant les personnes déménageant de zone à potentiel piétonnier inférieur vers des zones à potentiel piétonnier supérieur (et vice versa) contribuerait à fournir des éclaircissements à ce sujet. D’autres limites de cette étude comprennent le possible effet confusionnel résiduel de variables non mesurées et le fait que les résultats ne peuvent pas être extrapolés aux régions rurales du Canada.

Conclusion

La notion de potentiel piétonnier comprend un ensemble très précis de facteurs semblant favoriser la marche aux fins de transport chez les adultes. De plus amples études sont nécessaires pour déterminer et examiner d’autres caractéristiques d’environnement bâti encourageant l’activité physique des enfants (p. ex., le caractère propice aux jeux, les parcs, la sécurité) et l’activité physique liée aux loisirs des adultes (p. ex., la verdure, les sentiers). Des études se concentrant particulièrement sur les adultes plus âgés sont également nécessaires.

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