Lucien Kupferman Université de Tel-Aviv
AVOIR ET LA PREDICATION SECONDE
0. Présentation de questions en suspens
0.1. L'item de, le prédicat avoir, et la prédication seconde
Le tour en il y a /avoir QP. . . de AP, où QP représente un groupe nominal quantifié (et donc référentiellement indéfini) et où un groupe adjectival, AP, est précédé de de, est considéré communément comme le cas prototypique des constructions existentielles mettant en jeu la prédication seconde (Milner 1978, cf. Kupferman 1980 et bien sûr les manuels d'usage). Ainsi, la forme (1) serait centrale :
(1) j'ai une place de libre pour vous
Celles de (2) sont jugées comme annexes, comme des extensions du type (1), et donc comme relativement marginales :
(2) i. elle avait sa fille de malade
ii. Paul a surtout L'INDEX de large
Les types (2) diffèrent de façon notable de (1) en ce que, première propriété, celui-ci n'autorise pas, contrairement à (2), de déterminant défini pour le groupe nominal (ou : DP = « groupe du déterminant ») post-verbal :
(3) j'aurai pour vous *la /? ma l*cette même place de libre 2
Et, deuxième propriété particularisant la construction (1), son prédicat secondaire de libre dénote nécessairement un état précaire (Kupferman, 1980), de niveau de phase3,
1. Cette étude a bénéficié du soutien de l'Académie des Sciences israélienne. 2. Un effet déictique rectifie la donnée : (i) j'ai cette place-là de libre pour vous La deixis a sans doute pour effet de créer un effet d'emphase (l'objet ainsi dénoté par ce N est une occurrence saillante extraite de la classe de N présente dans le contexte immédiat du discours). On revient ainsi au cas (2ii), avec lequel (i) diffère notablement en ce qu'il ne met pas en jeu une « partie du corps », qui autorise l'article défini et, en l'absence de de, les prédicats de propriété : (ii) Paul a l'index large / *j'ai cette place-là confortable pour vous Cf. la courte discussion de (6). 3. Rappelons ici la distinction introduite par G. Carlson - cf. Kleiber (1988) - entre prédicats (stables) attribués à des entités-individus qu'Hs peuvent repérer dans une classe notionnelle, indépendamment de tout paramètre spatio-temporel (cette jeune fille est blonde/ intelligente/ curieuse/...) des prédicats précaires décrivant des tranches spatio-temporelles, des phases, de ces entités-individus (cette jeune fille est ivre/ toute tremblante/ furieuse/...). Seuls les prédicats de niveau de phase peuvent introduire de nouveaux referents dans le monde du discours (des invités étaient ivres/ *blonds).
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