SOCIOLOGIE DU TRAVAIL N° 4-85

Antoinette Chauvenet et Françoise Orlic

Interroger la police

Le travail d'enquête en milieu policier1 présente par rapport à d'autres terrains d'analyse sociologique des particularités dont on peut se demander si elles constituent des caractéristiques propres à la police, permettant de spécifier l'appareil policier au regard d'autres organisations bien connues de la sociologie, ou bien si elles ne font que révéler des aspects présents dans l'ensemble de celles-ci et qui auraient échappé à l'observation parce qu'ils vont de soi, ne se présentent pas comme des problèmes, ou bien parce qu'ils sont plus dissimulés.

L'une des particularités de ce terrain de recherche est relative à la façon dont le chercheur s'y implique. A cette implication correspondent du côté policier des réactions à l'enquête qui laissent penser que l'investigation suscite par elle-même des enjeux importants.

Si certaines recherches reçoivent un accueil fait d'indifférence bienveillante, de gêne polie, d'intérêt désabusé (à quoi cela va-t-il servir?) ou bien essuyent un refus, l'enquête en milieu policier déclenche des réactions et des comporte¬ ments qui ne peuvent pas échapper à l'attention du chercheur et ne pas devenir ainsi un objet en soi de réflexion sociologique. Agressions verbales, prises à partie, provocations, défis, prises à témoin, mises à l'épreuve, marchan¬ dages, mensonges manifestes, effroi, prudence ostensible et tentatives de séduction constituent autant de réactions avec lesquelles le chercheur doit composer. D'autre part, l'observation est constamment entravée par des

Sociologie du travail. — 0038-0296/85/04 453 15'S 3.50/ © Gauthier-Villars

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