SOCIOLOGIE DU TRAVAIL N° 2-87
Anni Borzeix
Ce que parler peut faire
On a déjà beaucoup dit sur l'expression directe des salariés dans l'en¬ treprise; beaucoup écrit (l) aussi sur cette expérience inédite, réclamée depuis longtemps, on le sait, par au moins deux syndicats ouvriers (la CFDT et la CGT), devenue pratique légale par le vote d'une loi en août 1982, loi qui s'étendrait aujourd'hui à quelque quatre millions de salariés en France.
L'objet de ce texte n'est pas de proposer une énième version des faits. Nous ne nous demanderons pas si le droit d'expression est en passe de réussir ou d'échouer, si dans les faits les objectifs qui lui ont été assignés ont ou non été atteints. Au-delà des résultats concrets souvent minces ou décevants, nous nous intéresserons ici à cette expérience sous un jour plus prospectif : pour ce qu'elle révèle plus que pour ce qu'elle règle ; pour ce qu'elle provoque plus que pour ce qu'elle procure dans l'immédiat (2).
(*) Voir, entre autres, le n° 3/86 de Sociologie du travail qui rend compte d'un grand nombre de recherches menées récemment sur ce sujet.
(2) Cet article reprend les idées centrales développées dans la dernière partie, «Le poids des mots : analyse d'une réunion », d'un rapport de recherche récent : A. Borzeix, D. Linhart, D. Segrestin, Sur les traces du droit d'expression, CNAM, 1985, 2 tomes.
Sociologie du travail. — 0038-0296/87/02 157 20/$ 4.00/ © Gauthier-Villars 157
