SOCIOLOGIE DU TRAVAIL N° 4-87
Pierre Muller
Un métier né de la crise : exploitant rural
La crise économique n'affecte pas seulement les entreprises et les métiers de l'industrie. En agriculture aussi, on assiste à de profondes remises en cause des modèles professionnels apparus au cours des années de croissance. Comme dans d'autres secteurs, on peut percevoir deux types de réactions face à la crise.
La première est une «crispation corporatiste » des grandes organisations professionnelles qui vont chercher à préserver l'essentiel, c'est-à-dire une certaine définition de l'activité agricole. Cette conception organise le métier d'agriculteur et l'exploitation agricole autour de la fonction de production de matières premières. Le «bon agriculteur » est celui qui se spécialise dans une production (céréales, lait...) et qui augmente la productivité de son travail en «investissant », c'est-à-dire en utilisant des biens d'équipement et des consommations intermédiaires d'origine industrielle. La mise en marché des produits agricoles bruts est laissée aux organismes d'aval. Les fonctions de commercialisation et de transformation sont du ressort des industries agro-alimentaires dont les produits sont destinés à des marchés de masse. On ne peut pas dire que les agriculteurs se désintéressent de ce que deviennent
Sociologie du travail. —
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