APPROCHE SOCIOLOGIQUE DE LA GÉNÉRATION
Marc Devriese
Chez les sociologues et les psychosociologues, à lire Marc Devriese, il semble que la génération ne soit pas un concept mais une notion à géométrie variable. Leurs travaux permettent toutefois de distinguer utilement l'appartenance à une génération de celles de l'âge, de la cohorte ou de la période.
1. Kingsley Davis, « The sociology of parent-youth conflict», American Sociological Review, 5 (4), 1940, p. 523-534.
2. Gérard Mendel, La crise des générations. Etude socio- psychanalytique, Paris, P^yot, 1969.
3. Shmuel N. Eisenstadt, From generation to generation. Age groups and social structure, New York, Londres, The Free Press, Macmillan, 1964, 357 p.
4. Leonard D. Cain Jr., « Life-course and social structure », in E. Faris (ed.), Handbook, of modern sociology, Chicago, Rand McNaley, 1964, p. 272-309.
Une définition multiple
De quoi parle-t-on en sociologie quand on use du terme ou du thème de la génération ? Y a-t-il polysémie du mot ou pluralité des constructions scientifiques ? On évoquera trois axes de définition de la notion.
Un des pôles de recherche sur la génération est celui de la psychologie et la psychanalyse, c'est sur l'âge et la famille qu'elle focalise. Appuyée sur la psychologie de Piaget et de Kohlberg, elle étudie la structuration de l'individu, de sa personnalité, en analysant les mécanismes d'autorité et de transmission. Placée au niveau individuel et familial, la recherche s'étend néanmoins par le biais des fonctionnalistes au plan micro-sociétal1. Fondée sur des catégories de la psychanalyse comme le conflit oedipien, les recherches sur la génération tendent à établir un parallèle entre le conflit familial parents-enfants et les conflits jeunes-
adultes dans la société2. L'élargissement de la recherche à l'ensemble de la société, via la théorie d'Eisenstadt3, conduit les chercheurs à se pencher sur les mécanismes du changement social. Les démographes4, notamment, tentent d'analyser à leur tour la succession des générations et son effet.
Culminant avec l'œuvre des gérontologues, la recherche en psycho-sociologie se définit comme l'étude des cohortes démographiques tout d'abord, de leur arrivée à leur sortie de la pyramide des âges ; de la dynamique générationnelle ensuite, suscitée par la succession infinie des générations ; par l'analyse, enfin, du parcours de vie — le facteur âge —, de la constitution et du rôle des groupes d'âges — la stratification —, de la modification des comportements dus à l'âge — le behavioralisme —, et des differentiations qui en résultent. Il s'agit d'une sociologie de l'âge, des âges de la vie et du temps.
La sociologie politique offre une autre voie. Influencée par les études précédentes, elle tente d'appréhender les mécanismes par lesquels la société intègre les générations nouvelles : les phénomènes de transmission,
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